Lettre 21

 Monsieur Taquet,

Je vous ai déjà envoyé un mail directement sur votre compte ministériel. Pas de réponse. Je suis peut être trop naïve... sans doute! 

Je prends encore un peu de mon temps, sur mon temps personnel après ma journée de travail avec Paupiette, 11 mois et Mauricette, 21 mois. Je m'occupe d'eux depuis leur naissance, enfin plutôt leurs 3 mois respectifs. 

On passe nos journées dans le rire, la bonne humeur, la bienveillance, ... Ils s'épanouissent bien chez Nounou, et tant mieux! Mais ce soir, je l'ai "un peu gros sur la patate" comme on dit par chez nous, dans le Nord. Je l'ai gros car, en fin de journée, j'ai eu les yeux qui tirent, un mal de tête qui s'installe... bref, une migraine qui me guette. Alors en cette fin de journée, j'ai mis mes lunettes, histoire de calmer un peu ma vue en attendant que la Maman de Paupiette vienne le chercher (en plus, Paupiette est enrhumé...certainement une dent qui va arriver) donc il est un peu grincheux et dans ces cas-là, il aime bien être dans les bras de Nounou. Vous allez me dire "oui et? " Et alors, Paupiette m'a dévisagée ! Pourtant il m'a déjà vu, 42h/semaine, depuis ses 3 mois. Sauf qu'aujourd'hui, Nounou porte un masque. Elle en porte déjà un quand Maman ou Papa viennent le déposer le matin et le récupérer le soir. Mais là, (avec le dernier protocole) elle est obligée d'en porter un toute la journée, Paupiette et Mauricette l'ont remarqué. Mais ce soir, j'ai vu dans son regard, un regard qu'il n'a jamais eu, comme ci, il ne me reconnaissait pas! Et ça, mon cœur de Nounou en a pris un coup. Il a 11 mois et je ne me vois pas continuer ainsi, demain, après demain et ainsi de suite...! Ça devient du grand n'importe quoi.

Revenons sur le protocole sanitaire : je ne sais pas qui l'a pensé et rédigé comme les précédents mais je pense que cette personne ne doit pas avoir d'enfants. A vous lire, on ne fait que NETTOYER. L'hygiène chez nous est déjà irréprochable, les gestes barrières avec les tous petits, c'est obligatoire. Nous ne vous avons pas attendu pour cela. Nous vous attendons sur le reste !! Et votre silence devient méprisant.

J'ai 42 ans, je fais ce métier depuis 2017 suite à une reconversion professionnelle dans le commerce. J'adore mon métier. Heureusement d'ailleurs me direz-vous. J'aime allier mon métier et ma vie de famille. A la maison, les petits font partie de la famille. Alors en ce moment, on jongle entre les visios de mes ados dans leur chambre, le télétravail de mon mari et les comptines de Paupiette et Mauricette. OUI, j'accueille mes p'tits bouts car les parents n'auront retenu que les mots "autorisées à accueillir" et non " en cas de nécessité absolue". Et puis, bon, je préfère travailler que d'être au chômage partiel, indemnisée à 80% alors qu'un salarié lambda, lui, est à 84%. Déjà une incohérence !?! Bref...

Ce qui me désole fortement, c'est le fait d'être "oubliée". On n'a jamais autant parlé de notre profession de par votre bourde gouvernementale. Du jeudi soir, on ne travaille plus, mais du lendemain, on efface tout et on recommence comme en 40!! Cette fois NON ne comptez plus sur nous, pour nous TAIRE, faire comme AVANT, nous prendre et nous JETER car c'est franchement l'impression que vous donnez Mr Taquet.

Je vous ai vu à la télé hier soir en zappant sur la chaine parlementaire. Je ne vous avais jamais vu. Ca nous fait un point commun: on ne se connait pas !  Au lieu de nous claquer des infos aux JT de 20h, faire un bordel monstre comme ce fut le cas, aller à la pêche aux infos sur le net car je n'ai reçu, à ce jour, aucun mail de la PMI. C'est une HONTE!!! Une HONTE Monsieur.

Il serait temps cher Monsieur le Secrétaire d'Etat d'agir pour les 280 000 assistantes Maternelles que nous sommes. Il serait temps de vous préoccuper de l'avenir de nos p'tits bouts qui, à force de protocole et de procédure, sont perturbés. Il serait temps de vous occuper de NOUS cher Monsieur Taquet pour que l'on soit enfin RECONNUES à notre juste valeur.

Je ne sais pas si vous avez des enfants, si tel est le cas, penchez-vous sur le sujet sérieusement. Car cette fois ci, on ne laissera pas tomber. C'était la goutte de trop. "